dimanche 26 avril 2009

Leçon de chinois: prononciation

Je n'ai pas de photos de gare, alors j'ai choisi ce qui s'en rapproche le plus, c'est à se taper la tête contre les murs, mais c'est aussi très divertissant. Un voyage en Chine peut se transformer en cauchemar si le touriste oublie de se munir, non pas de tablettes immosel, mais d'une bonne prononciation, et ceci particulièrement dans certains moments critiques:
Une gare en Chine c'est 10, 15, 20 guichets, chacun leur file attitrée avec des temps d'attente tellement longs qu'aux fermetures régulières, programmées et affichées pour pause de 20 minutes les gens préférent rester dans la file plutôt que de changer de guichet. Le choix du guichet est alors le résultat d'un processus d'optimisation dont la complexité perdrait le meilleur expert en théorie des jeux. Situation tendue où les quelques resquilleurs sont aussitôt repoussés par un vigile armé de son mégaphone (en chine le mégaphone ne s'utilise qu'à bout portant, il n'est pas fait pour s'adresser à un groupe lointain mais bien pour crier le plus fort possible dans les oreilles).
Il se trouve qu'un jour lorsqu'après une heure d'attente ce fut à mon tour de m'adresser au guichet, il ne restait plus que 10 minutes avant la prochaine pause, et je sentais comme autant d'aiguilles d'acupuncture dans la nuque les dizaines de paire d'yeux de ceux qui commençaient à réaliser que leur calcul de chances et leur espoir d'obtenir un ticket rapidement risquaient bien d'être ruinés à cause d'un touriste lent à la comprenette. Conscient du poids qui pesait sur mes épaules, je commandai en détachant mes mots un billet pour Xi'an. La sanction fut sans appel: "Xian?" répéta le guichetier, visiblement perdu. "Xian?" répétèrent ses collégues aux guichets avoisinants. Je répétai, plus lentement. "Xian, shenme (quoi?) Xian?" me répondit de nouveau le guichetier, et l'enjeu étant de taille, de ma file et la file attenante s'élevérent bientôt un concert de "Xian, Xian, Xian?", tous voulant m'aider à me tirer, et eux du même coup, de ce mauvais pas. Je pris ma respiration, et touché par une inspiration purement divine, lançait un "Xian" accentué aux deux syllables avec le premier accent (constant en haut) au lieu du vague quatriéme accent (descendant) que j'avais d'abord choisi. Le visage du guichetier s'éclaira subitement, un soupir de soulagement parcourut la salle, "Xian! Xian! Xian! Xian!" retentirent de toute part comme autant d'Halleluïas et la foule en liesse m'aurait porté aux nues si cela n'avait pas été un risque de perdre leur place dans la queue. Le guichetier accrocha un peu sur mon "libai tian (dimanche)" mais fut immédiatement rappelé à l'ordre par les "libai tian!" secs de mes suivants qui trouvaient cette fois-ci la prononciation honorable et prièrent l'agent d'arrêter de chipoter et de me donner mon billet.
Depuis ce jour-là je consulte religieusement les indications de prononciation de mon guide.
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